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L'histoire de PICASSO, le CubeSat tout d’or vêtu

2022-09-08

La semaine dernière (2 septembre) a marqué le deuxième anniversaire du lancement de PICASSO, la première mission CubeSat de l'Institut royal d'aéronomie spatiale de Belgique. Cette mission a démontré la faisabilité de la télédétection atmosphérique et de la mesure in situ du plasma ionosphérique avec un CubeSat, et a également permis de tirer de précieux enseignements sur cette nouvelle technologie.

Le conte de PICASSO : un happy end mitigé

PICASSO est une histoire fantastique, pleine d'espoirs et d'exaltation, mais qui révèle aussi la complexité et les risques inhérents au développement de technologies de pointe pour les missions spatiales. Ambitieux dans sa conception à une époque où l'industrie des CubeSat n'en était qu'à ses débuts, PICASSO s'est avéré plus complexe et difficile à développer que prévu par tous les partenaires du projet, ce qui a finalement conduit à l'échec de l'avionique de la mission mais à son succès en tant que concept scientifique.

Picasso ID card

Paré d'or

PICASSO a été appelé "le CubeSat d’or" parce qu'il est revêtu de ce métal non réactif. Le placage d'or a été réalisé spécifiquement pour l'un des instruments embarqués, SLP (voir ci-dessous), qui exigeait que la surface de l'engin spatial soit électriquement conductrice afin de réduire les effets de charge pendant son fonctionnement. Il s'agissait d'une prouesse technologique qui a causé quelques soucis et retards. En effet, les premiers modèles de panneaux solaires n'ont pas résisté aux tests thermiques, des fissures s’y étant formées, et les panneaux ont dû être refaits à plusieurs reprises à cause de ce revêtement d'or, magnifique mais techniquement difficile à maitriser.

La charge utile de PICASSO

La raison d’être du revêtement en or est le premier des deux instruments à bord de PICASSO, le « Sweeping Langmuir Probes » (SLP), entièrement développé à l’IASB. Son objectif principal est de mieux comprendre le couplage magnétosphère-ionosphère et la formation des aurores. Il utilise quatre sondes de Langmuir cylindriques (cylindre doré sur l'image ci-dessous) fixées sur le côté des panneaux solaires déployables pour récupérer les paramètres du plasma, à savoir la densité et la température des électrons ainsi que la densité des ions et le potentiel du vaisseau spatial dans l'ionosphère (couche supérieure de l'atmosphère, au-dessus de 80 km d'altitude).

Comme la densité et la température de l'ionosphère présentent une très grande variabilité journalière, les observations in situ sont très importantes pour étudier les changements spatiaux et temporels au niveau local. SLP a pu tester avec succès tous ses modes de mesure et a obtenu des courbes de courant par rapport au potentiel, ou courbes « I-V », très nettes pendant une durée totale d'environ 60 minutes (voir l’exemple de courbe I-V ci-dessous). Une telle courbe I-V peut être utilisée pour déterminer divers paramètres tels que la densité et la température du plasma ionosphérique.

In-flight measures
Courbe I-V mesurée en vol avec 200 points de données non-équidistants, acquis le 30.01.2021 à 13:03:49 UTC. (a) échelle linéaire, (b) échelle semi-logarithmique.

Le deuxième instrument, VISION (VIsible Spectral Imager for Occultation and Nightglow), a été proposé par l’IASB et développé par VTT (Finlande). Il a pour objet la détermination de la distribution verticale d'ozone dans la stratosphère (12-50 km) et du profil de température jusqu'à la mésosphère (50-90 km) par observation de levers et couchers de soleil à différentes longueurs d'onde à travers l'atmosphère. Il a acquis avec succès plusieurs images du Soleil. Cependant, en raison de la défaillance du système de contrôle de l’attitude  du Cubesat, l'interféromètre n'a pu être complètement testé. Mais même avec quelques images seulement, nous considérons l'instrument VISION comme un succès car il a démontré que la télédétection atmosphérique avec un CubeSat est possible. Les concepts démontrés par VISION et SLP valident l'idée que les CubeSats / SmallSats sont des outils pertinents pour des études scientifiques importantes et la surveillance de l'atmosphère avec des instruments de pointe.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Malgré un parcours long et difficile, nous restons optimistes quant à l'avenir de la technologie démontrée par la mission PICASSO. Les scientifiques qui ont développé les instruments seraient heureux de voir cette technologie réutilisée dans d'éventuelles missions futures. Et PICASSO est devenu un symbole du chemin parcouru par l'humanité dans le domaine des sciences spatiales : les succès, les échecs, les espoirs, les ambitions et les rêves, aussi brillants que la belle surface dorée du vaisseau spatial.

Remerciements

PICASSO est le fruit d'une collaboration internationale, dirigée par l'Institut royal d'aéronomie spatiale de Belgique (BIRA-IASB), et comprenant AAC Clyde Space Ltd (Royaume-Uni), l'ESA (Agence spatiale européenne), le VTT Technical Research Center (Finlande) et le Centre Spatial de Liège (Belgique).

PICASSO a été financé par l'élément de démonstration en orbite du Programme général de technologie de soutien (GSTP) de l'ESA, par la politique scientifique fédérale, BELSPO. PICASSO a également reçu le soutien financier de la Loterie Nationale.

 

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PICASSO, la première mission CubeSat de l'Institut royal d'aéronomie spatiale de Belgique.
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Un exemple de sonde de Langmuir plaquée or.
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Première image du Soleil par VISION prise à travers un interféromètre Fabry Perot (FPI), donnant une image monochromatique du Soleil à 601,9 nm.